- Par Christelle Dubois-Frapsauce
LA DICROCOELIOSE Maladie parasitaire du foie due à la petite douve
Cette maladie parasitaire du foie et des canaux biliaires se rencontre dans beaucoup de régions et peut concerner les bovins, les caprins et les ovins, les petits ruminants y étant particulièrement sensibles.
Il s’agit d’un parasitisme de pâturages secs et sur sol calcaire essentiellement.
Les élevages concernés une année le sont généralement les années suivantes du fait de la grande résistance des œufs dans le milieu extérieur (jusqu’à 20 mois) et du cycle particulier de développement de la petite douve qui nécessite deux hôtes intermédiaires, un gastéropode terrestre xérophile (aime les climats chauds et secs) et une fourmi.
Le parasite adulte vit dans les canaux biliaires où il peut s’accumuler (longévité de plusieurs années). Il se nourrit essentiellement de bile. Il pond des œufs qui seront excrétés par le ruminant dans le milieu extérieur avec les matières fécales. Ces œufs seront ingérés par un mollusque et vont s’y transformer en un premier stade larvaire, la CERCAIRE qui sera rejetée dans le milieu extérieur avec du mucus. La fourmi se nourrit de ce mucus et ingère les cercaires. Des METACERCAIRES (deuxième stade larvaire) se localisent au niveau du ganglion nerveux sous-œsophagien, engendrant des contractions mandibulaires qui bloquent la fourmi en haut des brins d’herbe, favorisant la contamination. Ce phénomène est accentué lorsque la température est inférieure à 13°C, donc essentiellement en fin de nuit.
L’infestation des animaux a lieu essentiellement en été et en début d’automne en ingérant de l’herbe avec des fourmis et plutôt le matin.
Clinique
Les symptômes de l’infestation par la petite douve sont plus discrets qu’avec la grande douve. La pathogénicité de Dicrocoelium repose essentiellement sur son accumulation en bouchons dans les canaux biliaires (dilatation, absence de calcification) qui n’assurent plus l’écoulement de la bile vers l’intestin grêle. La digestion des aliments et l’assimilation des nutriments se fera alors moins bien. On pourra observer une sous-productivité (mauvaise lactation), un mauvais état général, une laine de mauvaise qualité, un amaigrissement et éventuellement de la diarrhée.
Diagnostic
Il se fera grâce à plusieurs indicateurs en plus de l’état général des animaux :
- des remontées d’abattoir (saisies de foies de brebis ou d’agneaux)
- des autopsies : les petites douves sont visibles quand on vide les canaux biliaires
- des examens coproscopiques : sur au moins cinq animaux. L’intensité d’excrétion est variable au cours de l’année, maximale en automne et hiver. La décision thérapeutique se fera si la moyenne des résultats est élevée ou si plusieurs résultats sont positifs, toujours à la lumière de l’état général des animaux et de l’historique de l’exploitation.
Traitement
En cas de mortalités ou de forte dégradation de l’état des animaux ou de leurs performances, en cas de présence d’autres parasites associés, un traitement sera fait en urgence. Sinon, le traitement se positionnera en fonction du stade physiologique des animaux (préserver la lactation) et de la saison (après les premiers froids et/ou à l’entrée en bergerie).
Sur une exploitation où le risque est connu, il est nécessaire d’effectuer un traitement une fois par an pour éviter l’accumulation et une décompensation brutale autour de l’agnelage. Cela permet également de réduire l’excrétion d’œufs de petite douve sur les pâtures.
Le choix thérapeutique est à ce jour très limité : seul l’albendazole à forte dose dispose d’une AMM pour les petits ruminants contre la petite douve (4 fois la dose contre les strongles digestifs). Cependant à cette dose, l’albendazole a des effets tératogènes pour le fœtus : il est donc Contre-indiqué pendant le PREMIER TIERS DE GESTATION. Ce médicament ne présente pas de rémanence : il n’a donc AUCUNE ACTION PRÉVENTIVE sur une nouvelle infestation.
De plus, la petite douve n’étant pas accessible aux médicaments qui passent dans le sang, elle n’est pas sensible aux traitements spécifiques de la grande douve.
Prévention
Le cycle de développement de la petite douve rend toute volonté d’éradication illusoire : l’élimination des hôtes intermédiaires infestés n’est pas réalisable et ceux-ci survivent dans le milieu extérieur pendant l’hiver. Ils permettront donc une ré-infestation à la mise à l’herbe dès que les conditions seront favorables à la reprise de leur activité.
On peut conseiller de ne pas sortir les animaux trop tôt le matin si ceux-ci passent la nuit en bergerie.
Comme les autres maladies parasitaires, la dicrocoeliose se développe d’autant plus que les animaux sont affaiblis : sous-alimentation (par exemple période de sécheresse où le manque d’herbe n’a pas été compensé par une complémentation, ration manquant de matière azotée), présence d’autres parasites (grande douve, paramphistomes, strongles digestifs en grande quantité). Il est donc important de maintenir un bon état d’entretien de son troupeau.
Certains aliments complémentaires formulés avec des plantes et ou des huiles essentielles connues pour leur action sur les parasites peuvent aider les animaux à mieux gérer les infestations parasitaires (exemple de PHYT’ANAT B). 0110161 Il faut cependant rester vigilant et tout en surveillant l’état général des animaux, effectuer régulièrement des examens coproscopiques. Ne pas hésiter à faire réaliser des autopsies en cas de mortalité.