Effluents d’élevage caprin : choisir la solution technique adaptée

L’élevage caprin, laitier ou fromager, produit un certain nombre d’effluents qui peuvent présenter un risque de pollution pour l’environnement s’ils ne sont pas gérés.

Aujourd’hui, la question environnementale est un enjeu sociétal majeur. Sa prise en compte est nécessaire pour des raisons de préservation des milieux naturels d’une part, et pour une meilleure acceptabilité de l’élevage par la société d’autre part.


Effluents d’élevage caprin :  choisir la solution technique adaptée

Cet article ne présente pas en détail les solutions techniques possibles mais propose une aide à la décision pour déterminer, en fonction de la situation de votre élevage caprin, quels dispositifs seront les plus appropriés.

Le recours à un conseiller spécialisé est très souvent nécessaire, c’est lui qui vous permettra de faire votre choix et qui, éventuellement, réalisera l’étude technique complète pour implanter la solution retenue.


Pourquoi gérer les effluents ?

Les effluents d’élevage déversés en excès dans le milieu provoquent à terme une modification du milieu aquatique. Les bactéries contenues dans les effluents consomment de l’oxygène et entrent ainsi en concurrence avec les poissons et autres organismes vivants. Le phosphore et les nitrates entraînent une croissance excessive des algues et des végétaux. Ces deux phénomènes contribuent à l’eutrophisation du milieu.

Les effluents doivent donc être épurés avant de retourner dans le milieu.

Ce que prévoit  la réglementation

Différentes réglementations s’appliquent à la question de la gestion des effluents, selon la zone géographique où se situe l’élevage et selon sa taille. Une règle, issue notamment des Règlements Sanitaires Départementaux (RSD) et de la Loi sur l’eau est cependant commune à tous les élevages :

« Pas de rejet direct dans le milieu »


En zone vulnérable, les éleveurs doivent avoir un plan de fumure prévisionnel, enregistrer leurs pratiques d’épandage, avoir moins de 170 kg d’azote organique par hectare de surface épandable et n’épandre qu’à certaines périodes, ce qui a des conséquences sur le stockage éventuel des effluents.

La durée de stockage varie entre 4 mois (si eaux blanches pures + lactosérum) et 6 mois (si autres effluents : eaux brunes, lixiviats de fumière…), en fonction des situations. Pour évaluer la capacité de stockage nécessaire au respect de cette durée, vous pouvez utiliser un outil gratuit mis en ligne par l’Institut de l’Élevage 

(Pré-dexel 

http://predexel.idele.fr/index.htm).


Votre exploitation est-elle en zone vulnérable ? Pour le vérifier, contactez un conseiller de la Chambre d’Agriculture de votre département.





Les différentes solutions techniques


La solution la plus appropriée à votre situation dépend de plusieurs facteurs :


Nature et quantité d’effluents à gérer : eaux blanches, lactosérum, lait non commercialisable, eaux vertes, lixiviats de fumier, effluents domestiques,

 Localisation géographique : zone vulnérable ou non,

Capacité d’investissement financier : coût de la solution,

Temps de maintenance / fonctionnement acceptable : temps de travail, coût de maintenance, coût de fonctionnement (électricité par exemple pour SBR, carburant pour épandage).

Deux grandes voies sont possibles, avec des solutions techniques différentes, des avantages et inconvénients spécifiques :

1. Stockage et Épandage : les effluents sont stockés dans des citernes ou fosses puis repris et épandus sur les surfaces de l’exploitation.

2. Traitement des effluents : les solutions mises en oeuvre permettent de diminuer la charge polluante via plusieurs étapes. Le choix des solutions sera principalement orienté par la nature des effluents à traiter : eaux blanches seules ou mélangées au lactosérum.

Dans le cas d’un élevage fromager, le lactosérum peut être géré à part en le distribuant aux animaux : porcs à l’engrais ou chèvres. La situation devient alors de même type que celle d’un élevage laitier avec uniquement des eaux blanches à gérer.

À noter : toutes les solutions de traitement proposées permettent d’intégrer dans le dispositif les effluents domestiques, mais il convient toutefois de dialoguer avec le SPANC (Service Public d’Assainissement Non Collectif) pour valider le projet.

Quelles solutions techniques par type d’élevage ?



Les questions à se poser avant le choix

• Quels effluents et en quelle quantité ?

- Eaux blanches de la salle de traite

- Eaux blanches de fromagerie : 2,8 litres par litre transformé

- Lactosérum : 0,7 litre par litre transformé

- Autres effluents d’élevage : présence d’un autre atelier animal, eaux vertes, lixiviats de fumier

- Effluents domestiques

• L’exploitation est-elle en zone vulnérable ou non ?

• Ne pas oublier également que du temps pour le fonctionnement ou la maintenance sera nécessaire.

• Quel coût d’investissement ? de fonctionnement ? Quelle capacité d’investissement financier ? Existe-t-il des aides au financement ?


Être accompagné pour faire le meilleur choix

Le choix d’une solution technique dépend de nombreux paramètres. Cet article vous permet de faire rapidement le point sur les solutions techniques existantes, elle vous sera utile en début de réflexion mais ne pourra pas répondre à toutes vos questions. Les besoins précis, la configuration de votre exploitation (lieu, taille, pente…), la capacité d’investissement, le temps de travail nécessaire à la maintenance… sont autant d’éléments à prendre en considération.

Des conseillers en bâtiments et en environnement peuvent vous accompagner, ils sont joignables dans les Chambres d’Agriculture ou les entreprises de Conseil Élevage de votre département. N’hésitez pas à les contacter.


Stockage

Citerne souple avec agitation

• Accepte tous les effluents

• Pas d’augmentation du volume par les eaux de pluie

• Pas d’odeurs

• Déplaçable

• Assez économique



• Risque d’encrassement si laits

• Pompe de relevage nécessaire si pas de dénivelé



Fosse géomembrane



• Accepte tous les effluents

• Brassage possible

• Assez économique


• Volume et espace au sol important

• Non couverte d’où odeurs et eaux pluviales en sus


Fosse béton couverte


• Accepte tous les effluents

• Pas d’augmentation du volume par les eaux de pluie

• Pas d’odeurs

• Sécurité assurée


• Prix élevé


Épandage



• Facile à mettre en oeuvre : tracteur + tonne à lisier

• Possibilité de déléguer : Cuma ou Entreprise


• Peu d’intérêt agronomique de par la nature des effluents épandus

• Temps de travail important

• Épandage impossible en période hivernale


Traitement des eaux blanches

Filtre à sable planté  de roseaux à 2 étages

• 1 fosse toutes eaux

• 2 étages de filtres plantés de roseaux

• 1 sillon d’infiltration


• Simple à mettre en oeuvre

• Auto-construction possible

• Maintenance limitée : 1 jour par an pour la coupe des roseaux et 0,5 jour par an pour coucher les roseaux avant l’hiver

• Intégration paysagère


• N’accepte pas le lactosérum ou les laits non commercialisables


Lagunage

• 1 BTS ou 1 filtre à paille

• 3 bassins de lagunage

• Parcelle enherbée ou bosquets épurateurs ou massifs filtrants


• Autoconstruction possible en partie

• Accepte les eaux brunes et vertes d’un atelier bovin

Si sol non étanche, besoin d’ajouter une géomembrane

• N’accepte pas le lactosérum ou les laits non commercialisables

• Odeurs importantes


Le Code Mutuel de Bonnes Pratiques  et la gestion des effluents

Par son engagement dans le Code Mutuel de Bonnes Pratiques en élevage, l’éleveur adhérent participe à la démarche Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) de la filière caprine.
Le Code Mutuel est en effet le premier maillon d’une démarche de filière respectueuse de l’homme (prévention de la pénibilité, traçabilité pour des produits de qualité…), de l’animal (bien-être, alimentation et soins de qualité…) et de l’environnement (pratiques moins polluantes, économies d’eau et d’énergie…).
Cela se traduit notamment par la gestion des effluents d’élevage, point important pour limiter l’impact de l’activité caprine sur l’environnement.


Traitement des eaux blanches et du lactosérum

Bassin Tampon de Sédimentation + Épandage agronomique

• 1 bassin tampon de sédimentation : fosse béton couverte

• Une pompe d’irrigation basse pression ou ligne d’asperseurs ou asperseur mobile

• Surface de prairie


• Auto-construction possible

• Épandage automatique toute l’année (sauf jours de pluie, gel ou neige)

• Accepte tous les effluents

• Économique en fonctionnement


• Suivi de l’épandage

• Déplacement des asperseurs

• Coût d’investissement de départ


Boues activées – SBR

(Sequencing Batch reactor)

• 1 réacteur

• 1 traitement biologique aérobie

• 1 traitement physique de décantation

• Séparation des eaux épurées et des boues


• Accepte tous les effluents

• Maintenance simple

• Intégration paysagère

• Pas d’épandage

• Pas de stockage d’effluents


• Nécessite du matériel pour épandre les boues

• Suivi tous les 10 jours

• Coût d’investissement de départ

• Consommation électrique


Filtre à pouzzolane

• 1 cuve de stockage

• 2 bassins avec pouzzolane (pierre volcanique) en alternance

• 4 passages de l’effluent

• Rejet dans un fossé enherbé


• Autoconstruction possible en partie

• Maintenance simple et économe

• Rigueur nécessaire dans la maintenance (respect de l’alternance)

• Coût d’investissement de départ

• Difficile à mettre en place en zone fortement gélive

• Pas adapté aux grands troupeaux


Tumulus à compost + BTS + Filtre planté de roseaux à 1 étage avec recyclage

• 1 tumulus de compost : pré-traitement du lactosérum

• Traitement de la sortie du tumulus et des autres effluents par le filtre planté de roseaux


• Autoconstruction possible en partie

• Accepte tous les effluents

• Entretien aisé

• Encore peu connu




D’après une fiche technique dont les auteurs sont :  E. Caramelle-Holtz, N. Bossis, J. Capdeville (Institut de l’Élevage), C. Béalu (CA 79)

Crédit photos : C. Béalu (CA 79), J. Capdeville, JL. Ménard (Institut de l’Élevage)