- Par Maya Diehl
Fleurs de nos campagnes : les plantes à ne pas confondre...
Les fleurs de nos campagnes se présentent depuis des siècles en tant que plantes comestibles, médicinales et ornementales. Certaines d’entre elles sont d’un aspect proche de plantes toxiques pouvant faire courir un risque non négligeable pour la santé, voire sont mortelles pour nous, nos animaux de compagnie ainsi que nos animaux de rente si elles sont confondues.
Ci-après sont décrits des duos et trios à bien connaître pour les différencier.
-
Gentiane jaune
-
Vératre blanc
GENTIANA LUTEA
(Linné 1753)
Présente à l’état sauvage en France dans les étages collinéens à montagnards des massifs, la gentiane jaune vit dans les pelouses, prés, lisières et clairières.
C’est une plante vivace glabre pourvue, chez les sujets de plusieurs années, d’une tige robuste creuse, non ramifiée, s’élevant jusqu’à 2 mètres de haut. La racine est allongée, brunâtre, grosse et cassant facilement en arborant une zone de coupe jaunâtre à forte odeur aromatique. Les feuilles sont lancéolées, atteignant 15 cm de large avec 5 à 7 nervures convergentes : elles se disposent le long de la tige de façon opposée. La gentiane fleurit de juin à août sur des plantes de 10 ans et plus, avec des fleurs jaunes en verticille à l’aisselle des feuilles, les pétales s’ouvrant en étoile.
La plante est utilisée dans la production de liqueur par macération et distillation des racines de plantes âgées d’au moins une dizaine d’années. La racine contient des substances amères (sécoiridoïdes monoterpéniques : gentiopicroside, amarogentine ou gentiobiose), des xanthones (gentisine), des dérivés triterpénoïdes, des aldéhydes et des monoterpènes (limonène et linalol).
C’est une boisson apéritive amère et alcoolisée, de couleur jaune.
Attention, la cueillette en France est réglementée voire interdite selon les régions.
Propriétés médicinales traditionnelles
Tonique amère et digestive.
Propriétés potentielles
Fortifiante, immunostimulante, carminative, antispasmodique, dépurative, hépatoprotectrice, antipyrétique, avec une action antiparasitaire et antifongique.
VERATRUM ALBUM
(L ; 1753)
Plante de prairies humides et de pâturages des massifs montagneux, entre 700 à 2000 mètres d’altitude, c’est une vivace herbacée sauvage d’apparence très proche de la gentiane jaune lorsque les deux plantes ne sont pas en fleur. Le vératre blanc possède une tige robuste pouvant atteindre 1,5 mètre de haut, et un rhizome court, trapu et noirâtre d’où partent de nombreuses racines. Les feuilles sont grandes, ovales – lancéolées, à nervures non divisées, et sont disposées le long de la tige de façon alterne. Le vératre blanc porte des fleurs blanches à verdâtres disposées en cymes terminales, avec des fleurs hermaphrodites dans le bas de la cyme, et mâles dans le haut.
L’ensemble de la plante est toxique, en particulier la racine, même sèche : celle-ci contient des alcaloïdes stéroïdiques (rubijervine, jervine, germine), hétérosidiques (pseudojervine, isorubijervosine) et estérifiés (protovératrines A et B). Ces alcaloïdes agissent en modifiant la perméabilité sodique par l’augmentation de la concentration intracellulaire du sodium, avec un effet inotrope positif.
Usage thérapeutique ancien :
vomitif, purgatif violent.
Intoxication :
- chez les herbivores, l’intoxication intervient par consommation de la plante dans les pâturages de montagne en estive.
- Chez l’homme, l’intoxication se fait lors de la récolte en cas de confusion avec la gentiane jaune.
20 mg d’alcaloïdes sont mortels, correspondant à 1 à 2 g de racine séchée.
Symptomatique en cas d’intoxication :
Chez l’humain et les mammifères :
- Impact de la sphère ORL dès quelques minutes après l’ingestion : brûlure buccopharyngée, hypersalivation, sensation de surdité, éternuements.
- Paresthésie d’abord des extrémités puis de la peau, vomissements, nausées, diarrhée, sueurs froides.
En cas d’intoxication massive :
- Perte de connaissance et confusion mentale, convulsions.
- Troubles du rythme cardiaque (arythmie, bradycardie, hypotension, collapsus).
- La mort peut intervenir dès 3 heures après l’ingestion.
-
Ail des ours
-
Muguet
-
Sceau de Salomon
La confusion entre ces espèces intervient généralement en dehors de la floraison. L’ail des ours peut également être confondu avec la colchique (Colchicum autumnalis), ou le gouet (Arum maculatum) lorsque ce dernier démarre au printemps.
ALLIUM URSINUM
(L . 1753)
Plante à bulbe de sous-bois frais, pouvant atteindre 50 cm de haut, l’ail des ours forme des colonies importantes dans des conditions favorables à l’espèce. Les feuilles lancéolées apparaissent très tôt dans l’année, dès février-mars, et dégagent une forte odeur d’ail lorsqu’elles sont froissées. Elles se trouvent par deux pour chaque tige florale, et sont brillantes sur la face supérieure, mat en dessous. La floraison en ombelle blanche de fleurs à 6 pétales se déroule d’avril à juin.
L’odeur typique de l’ail des ours provient notamment de ses composés soufrés (alliine et allicine par exemple).
Ce sont surtout les feuilles qui sont employées en cuisine
CONVALLARIA MAJALIS
(L . 1753)
Plante de sous-bois à rhizome traçant rameux, le muguet atteint 20 cm de hauteur. Les feuilles sont ovales à lancéolées, en général par deux pour chaque hampe florale. Elles sont d’aspect mat sur la face supérieure, et brillante sur la face inférieure de la feuille, à l’inverse de l’ail des ours, et sont plus charnues que les feuilles de l’ail des ours. Chaque hampe florale porte des fleurs blanches en clochette apparaissant entre avril et juillet selon la région.
Le muguet fut utilisé en parfumerie compte tenu de l’odeur agréable dégagé par les fleurs.
L’ensemble de la plante est toxique, même sèche : elle contient des saponosides qui ont une action irritante sur le tube digestif, ainsi que des hétérosides cardiotoxiques (convallatoxine, convallatoxol, convaloside par exemple).
Intoxication :
Des intoxications ont été recensées chez chat, chien, lapin et oiseaux notamment. Il peut être à risque pour l’homme en cas de confusion avec l’ail des ours, ou lors de la cueillette des hampes florales pour composer des bouquets. Parfois l’intoxication intervient chez l’enfant par ingestion des baies.
Symptomatique en cas d’intoxication :
Chez le mammifère :
- Apparition des symptômes entre 15 minutes et 6 heures après ingestion.
- Vomissement, hypersalivation.
- Éventuellement diarrhée parfois hémorragique et douleurs abdominales.
- Augmentation du volume d’urine.
- Par la suite tremblements, ataxie, convulsions.
- Prostration et décubitus latéral.
- Bradycardie, troubles du rythme cardiaque intervenant sur la fin du processus.
Chez les oiseaux :
- Abattement, prostration.
- Régurgitations, diarrhée.
POLYGONATUM OFFICINALE
- ODORATUM
- MULTIFLORUM
- VERTICILLATUM
Ces plantes sauvages vivaces à rhizome poussent en sous-bois sec sur sol calcaire ou alcalin. Certaines espèces peuvent atteindre 80 cm. La floraison intervient d’avril à juin avec des fleurs tubulaires blanc verdâtre, pendantes, disposées selon les espèces en solitaire, par deux ou plusieurs.
L’ensemble de la plante est toxique, même sèche : elle contient de l’oxalate de calcium qui est irritant pour le tube digestif, et des saponines qui ont une action hémolytique. Les baies renferment des hétérosides cardiotoxiques.
Intoxication :
Des intoxications ont été recensées chez le chien notamment.
L’ingestion des baies en fin d’été provoque des intoxications chez les enfants.
Symptomatique en cas d’intoxication :
Chez l’animal :
- Apparition des symptômes entre 15 minutes et 6 heures après ingestion.
- Vomissement, hypersalivation.
- Éventuellement diarrhée parfois hémorragique et douleurs abdominales.
- Par la suite tremblements, ataxie, convulsions.
- Prostration et décubitus latéral.
- Bradycardie, troubles du rythme cardiaque interviennent sur la fin du processus.
Chez l’humain en cas d’ingestion :
Moins de 5 baies :
- Troubles digestifs avec nausées, vomissement, diarrhée, hypersalivation.
Au-delà de 10 baies :
- Hypoglycémie.
- Bradycardie, arythmie.
- Maux de tête, angoisse.
- Fièvre.
Une dermite irritante est provoquée par le contact avec la peau lors de la cueillette.
Prévention dans le cas du muguet et des Polygonatums
- Attention, il est préférable de ne pas planter ces espèces dans les jardins d’ornement, ou d’en limiter l’accès aux enfants !
- Ne pas manipuler ces espèces sans port de gants dans l’idéal.
- Supprimer l’accès aux jardins, haies et massifs comportant ces espèces par clôture permanente ou temporaire (électrique).
- Ne pas donner des déchets de taille de haies ou de désherbage aux herbivores.
- Attention lors d’échappée d’animaux dans les jardins et parcs publiques !
De façon générale, attention lors de cueillette de plantes sauvages : ne récolter que si l’identification des plantes est sûre.