- Par IFCE
Gestion pratique du vieux cheval
Le nombre de chevaux âgés est de plus en plus important en France, du fait de la volonté croissante des propriétaires d’équidés de leur offrir une retraite. Le vieillissement est un phénomène naturel, caractérisé par un ensemble de mécanismes biologiques, conduisant un organisme à ne plus assurer son équilibre physiologique. Une attention et des soins accrus ainsi qu’un suivi vétérinaire régulier sont nécessaires afin d’assurer à ces vieux chevaux une bonne qualité de vie. Le choix du moment de l’euthanasie doit être également réfléchi en amont avec l’aide d’un vétérinaire.
Une surveillance rapprochée
Le vieillissement du cheval est associé à de nombreuses modifications physiologiques et à un risque plus élevé de développer des maladies. Une surveillance accrue par rapport aux jeunes chevaux est donc nécessaire. Cette surveillance doit être minutieuse afin de déceler rapidement des signes cliniques évocateurs de maladies et faire intervenir le vétérinaire traitant rapidement.
En plus des signes de bonne santé à observer classiquement chez tous les chevaux, le détenteur doit être très vigilant sur les paramètres ci-contre.
Les chevaux âgés semblent ressentir et exprimer de façon moins importante la douleur que les jeunes, d’où l’importance d’une vigilance accrue.
Points de vigilance chez le cheval âgé © M. Delerue
Des soins préventifs réguliers
Santé générale
Un examen clinique régulier doit être effectué par le vétérinaire traitant car le cheval âgé a plus de risques d’être atteint d’une maladie chronique et les signes cliniques peuvent être moins évidents à observer que chez le jeune cheval. Un amaigrissement doit constituer un signe d’alerte déclenchant une visite vétérinaire. En effet, même si le vieillissement en lui-même peut favoriser un amaigrissement, il est le plus souvent également associé à une ou plusieurs pathologie(s). Ce suivi régulier est également important pour discuter avec le vétérinaire du moment adéquat pour décider de l’euthanasie du cheval.
Du fait de l’altération du système immunitaire, une augmentation de la fréquence des rappels de vaccination est préconisée :
- Vaccination contre le tétanos : rappels 1 fois par an.
- Vaccination contre la grippe et la rhinopneumonie : rappels annuels au minimum, voire tous les 6 mois en cas de risque infectieux augmenté (contact avec des équidés se déplaçant fréquemment ou cheval atteint de la maladie de Cushing induisant une baisse d’immunité par exemple).
Les préconisations concernant la vermifugation sont identiques à celles des chevaux adultes.
Dents
Un suivi dentaire deux fois par an est conseillé : les problèmes dentaires sont très fréquents chez le cheval âgé et constituent la première cause d’amaigrissement.
Pieds
Ferré ou déferré ?
Le vieux cheval est en général maintenu déferré. Pour des chevaux ayant été travaillés et ferrés toute leur vie, il faudra néanmoins être attentif à l’évolution des pieds lors du premier déferrage et adopter une période de transition pour éduquer le sabot à se maintenir.
Si les pieds s’avèrent trop fragiles (problèmes de locomotion, boiterie), une ferrure légère et adaptée apportera plus de confort, notamment aux membres antérieurs.
Lorsque cela est possible, les membres postérieurs seront déferrés afin d’assurer une sécurité pour la vie en groupe (limiter les coups de pieds ferrés).
Conseils d’entretien
Un parage régulier, effectué par un maréchal-ferrant, est nécessaire pour éviter les défectuosités d’aplombs et l’augmentation des douleurs de l’appareil locomoteur, fréquentes chez le cheval âgé.
Le détenteur doit également surveiller régulièrement l’état des pieds et adapter les soins en conséquence :
- Par temps très humide, assécher le pied avec du goudron de Norvège (sur la fourchette et la sole).
- Par temps très sec, appliquer des produits à base d’huile de lin, de laurier ou d’huile de pied de bœuf pour réhydrater la corne.
En hiver, il est souhaitable de donner accès à des surfaces stabilisées, plus au sec, pour éviter que les chevaux aient en permanence les pieds dans la boue.
Un mode de vie adapté
Un hébergement adapté
Un cheval âgé est idéalement logé au pré pour :
- Lui permettre de se déplacer et donc limiter la fonte musculaire et l’ankylose articulaire.
- Limiter les conséquences cliniques d’un asthme éventuel favorisé par un environnement poussiéreux.
Le pré doit être bien entretenu et ne pas comporter d’éléments dangereux car le cheval âgé est moins attentif à son environnement et peut présenter des troubles de l’équilibre voire une faiblesse généralisée.
Comme pour les jeunes chevaux, l’hébergement en groupe est préconisé. Dans l’idéal, ce groupe sera assez stable car le cheval âgé est plus sensible aux changements.
Le cheval âgé régule moins bien sa température du fait, notamment, de la diminution de ses réserves graisseuses. Un abri doit être à sa disposition pour le protéger du vent et des intempéries mais aussi de la chaleur en été. Cet abri doit lui permettre de se coucher sur un sol sec et non glissant afin de faciliter le coucher et le relever.
En hiver, les parcelles très boueuses doivent être évitées car elles peuvent être à l’origine de dermatophilose, infection des membres fréquente chez les vieux chevaux, ou de difficultés importantes à se déplacer.
Une alimentation spécifique
Rationnement
La ration sera composée de fourrages (minimum 20 % de cellulose dans la ration et au moins 2 % du poids vif du cheval en kg de matière sèche). Des aliments concentrés seront distribués selon la saison (indisponibilité en herbe) et en fonction de l’état corporel du cheval, donc généralement plus particulièrement en hiver. Le fourrage devra être appétent, sans poussières ni moisissures. On pourra privilégier l’utilisation d’enrubannés ou de foins récoltés à un stade précoce, donc plus digestibles pour les chevaux âgés qui ont du mal à garder de l’état. Des fourrages plus fibreux (récoltés plus tardivement) seront en revanche distribués aux chevaux dont l’état d’embonpoint est installé.
Le concentré n’est pas indispensable et sera distribué uniquement pour les chevaux qui ont du mal à se maintenir en état avec une ration herbe et/ou fourrage exclusive. Il existe aujourd’hui, sur le marché, une gamme importante d’aliments floconnés ou granulés destinés aux chevaux âgés. Ces aliments sont généralement très appétents et permettent de palier à la perte d’appétit parfois observée sur ces animaux.
L’alimentation devra être suffisamment riche en protéines et en acides aminés essentiels, notamment la lysine et la thréonine (tourteau de soja, luzerne). Il faudra en revanche limiter l’apport d’aliments riches en amidon, notamment pour les chevaux atteints de la maladie de Cushing sujets aux fourbures chroniques. La luzerne et la pulpe de betterave ont par exemple un index glycémique beaucoup plus réduit (moins d’amidon) que le maïs, l’avoine ou l’orge. L’huile peut aussi apporter 2 fois plus d’énergie que les céréales, sans apporter d’amidon.
Le besoin en minéraux et oligo-éléments est similaire aux autres catégories de chevaux. Une supplémentation en vitamine C ou E permettrait d’améliorer la réponse vaccinale. D’autres vitamines (A, E, C) et certains oligo-éléments auraient un effet antioxydant, limitant le vieillissement des tissus. Un apport sous forme de bloc ou seau à lécher doit être mis à disposition en permanence. Attention, les aliments concentrés du commerce sont tous enrichis en minéraux et oligo-éléments. Eviter de distribuer des minéraux et vitamines en sus dans les rations lorsque ces concentrés sont déjà distribués.
Distribution des aliments
Au sein d’un groupe, le vieux cheval est souvent dominé par les plus jeunes lors de la distribution de nourriture. Il faudra veiller à le mettre à l’écart pour qu’il ait accès à sa ration et laisser suffisamment de place disponible pour l’accès aux fourrages.
On pourra ajuster la hauteur de la mangeoire pour faciliter la préhension des aliments, notamment pour les chevaux qui souffriraient de maux de dos ou de pieds, limitant ainsi l’abaissement de l’encolure et la surcharge des membres antérieurs.
On privilégiera plutôt la distribution de petits repas fréquents de concentrés, tout en garantissant un accès au fourrage à volonté.
Si le cheval ne mange plus de fourrage, a du mal à mâcher, rejette une partie des aliments, il est primordial de faire vérifier sa dentition par un spécialiste avant toute recherche de complémentation en concentrés pour le faire grossir. Dans le cas où le cheval a du mal à mâcher, on pourra hacher le foin et lui apporter des concentrés présentés sous forme de barbotages, de soupes ou de bouchons mous, ou des aliments extrudés plutôt que des bouchons durs et secs.
Enfin, l’accès à l’eau et aux fourrages doit être facile pour les chevaux présentant des douleurs locomotrices.
De l’aide pour mieux supporter les contraintes saisonnières
En hiver, les chevaux rustiques n’ont pas forcément besoin de couverture, surtout si leur état corporel est satisfaisant. En revanche, ceux qui font peu de poils ou qui ont tendance à perdre de l’état pourront être couverts avec une couverture imperméable et/ou rentrés au box la nuit. Cela permettra d’éviter une perte d’état trop importante. Attention, celle-ci devra être retirée régulièrement pour vérifier l’absence de blessures, escarres ou infections cutanées.
En été, un masque peut être utilisé pour protéger ses yeux, plus fragiles, de l’irritation par les insectes et des rayons UV. Il est également important que le cheval ait au minimum une zone ombragée et/ou un abri à disposition dans la parcelle pour pouvoir se protéger.
Au printemps, l’herbe est plus riche en sucres et en matières azotées, ce qui peut favoriser les fourbures lorsque le cheval est déjà obèse et/ou lorsqu’il est déjà sujet à des maladies métaboliques. Faire entrer les vieux chevaux sur la nouvelle parcelle de façon progressive, c’est-à-dire quelques heures les premiers jours, puis augmenter le temps de présence progressivement sur une période d’au moins 10 jours. Penser à surveiller l’état des crottins (diarrhée ou crottins trop secs enrobés de mucus) pendant cette période.
De l’exercice physique, certes modéré mais maintenu !
Un travail adapté à ses capacités physiques peut être bénéfique pour la santé du cheval âgé, notamment pour éviter une fonte musculaire trop rapide, favoriser la souplesse articulaire et entretenir une bonne fonction cardio-vasculaire. Certaines spécificités sont cependant à connaître.
Le choix de l’euthanasie
Le choix de l’euthanasie doit être pris en concertation entre :
- Le vétérinaire traitant qui connaît le pronostic des maladies éventuellement diagnostiquées et pourra évaluer l’état de bien-être du cheval au moment de la consultation. Le suivi régulier du cheval est donc très important.
- Le détenteur du cheval qui l’observe au quotidien et a un avis sur sa qualité de vie.
- Et le propriétaire.
Les actes d’euthanasie peuvent être la conséquence :
- De maladies aiguës où la décision devra être prise rapidement, comme par exemple des coliques. Il est important que le détenteur ait réfléchi à ces éventualités en amont.
- D’affections chroniques à l’origine de douleurs importantes et/ou d’une qualité de vie dégradée malgré la prise en charge médicale (difficulté à s’alimenter, à se déplacer ou se relever, amaigrissement important…).
Pour favoriser une euthanasie dans de bonnes conditions pour le cheval et son propriétaire, une sédation et une anesthésie générale sont mises en place avant l’injection du produit euthanasiant.
Pour l’enlèvement du cheval, il faudra ensuite contacter :
- Soit un service d’équarrissage via l’ATM Equidé-Angee.
- Soit un service de crémation.
Par Marie DELERUE - Pauline DOLIGEZ - Laetitia MARNAY-LE MASNE