- Par Maya Diehl
Puces, parasite et vecteur, deux raisons de les contrôler !!
Les puces trouvées habituellement sur nos chiens et chats appartiennent majoritairement à l’espèce Ctenocephalides felis, la puce du chat. Les quelques 5% restant se répartissent entre Ctenocephalides canis (puce du chien, très spécifique à son hôte), ainsi que les puces présentent sur les espèces rencontrées par nos animaux domestiques à l’extérieur (lapin, hérisson, rongeurs par exemple). La puce humaine ou Pullex irritans peut également parasiter chien et chat.
PUCE, le parasite
Le stade adulte est aptère (c’est à dire sans aile), de corps aplati latéralement pour faciliter le passage entre les poils, et mesure de 1 à 8 mm selon l’espèce (jusqu’à 3,2 mm chez la puce du chat). Les pattes sont conformées pour le saut.
Œufs et adultes sont très résistants à la sécheresse, alors que les larves nécessitent un environnement humide pour se développer.
Le cycle se déroule en trois phases, avec une métamorphose complète entre le stade larvaire et adulte :
œuf ------> larve ------> nymphe ------> adulte
Les adultes sont des parasites obligatoires et se nourrissent exclusivement de sang, avec un hôte préférentiel en général, oiseau ou mammifère, même si elles peuvent s’attaquer à d’autres espèces si besoin (la puce du chat peut se nourrir sur le mouton !). Elles démarrent leur premier repas sanguin quelques minutes à peine après avoir sauté sur l’hôte, et feront plusieurs repas au cours de la journée, restant sur le même hôte toute leur vie (passage rare de chien à chien par exemple). Si ce dernier vient à mourir, elles le quitteront pour un nouvel animal.
La production d’œufs démarre dès les premiers jours avec une ponte pouvant atteindre une quarantaine d’œufs quotidiennement.
Les œufs tombent au sol et éclosent en 2 à 5 jours. Les larves s’alimentent au sol de déchets et d’excréments de puce adulte. Fuyant la lumière (photophobie), elles se cachent dans les maisons humaines sous les meubles, les tapis, et dans les fentes des parquets. Elles ont besoin d’une température comprise entre 7 et 32°C, et d’une humidité relative entre 50 et 85 % pour continuer leur cycle et muer deux fois avant de passer au stade de nymphe. Cette dernière peut passer des mois dans un cocon très résistant, et vivra au ralenti jusqu’à l’arrivée d’un hôte potentiel sur lequel elle sautera.
Traitement :
Contrairement aux tiques qui ont une saisonnalité, la puce peut être présente toute l’année sur son hôte. Son cycle complet dépend de la température extérieure : moins de trois semaines à 30°C, alors qu’il faut sept à douze semaines à 18°C.
L’ensemble des animaux domestiques (chiens, chats) vivant à la maison, au chenil et en extérieur doivent donc être traités régulièrement si l’on veut contrôler ce parasite :
Poudre :
ce produit ne tient pas longtemps sur l’animal !
Shampoing :
efficace pour éliminer les puces présentes sur l’animal au moment du bain, mais si le produit est rincé, son efficacité sera limitée dans le temps.
Pulvérisation :
le produit doit être appliqué à rebrousse-poil, avec un nombre de pulvérisation à adapter en fonction du poids. L’animal ne doit pas être mouillé dans les jours qui suivent.
Collier :
son efficacité dépend de la molécule l’imprégnant (conseil Seresto).
Spot on ou pipette :
l’application se fait en général à la base du cou, entre les épaules, en écartant les poils pour que le produit se dépose sur la peau.
Comprimé :
à faire avaler, plus ou moins rémanent selon le produit, et pouvant également éliminer les parasites internes. Ce traitement est facile à appliquer chez un chien en l’incorporant dans un bout de fromage ou de la pâte à tartiner pour masquer le goût, beaucoup plus compliqué chez le chat !!
Les molécules actives sont des insecticides (fipronil, perméthrine, imidacloprid, dichlorvos, carbaryl par exemple) ou des régulateurs de croissance (lufénuron, méthoprène par exemple).
Bon à savoir
Les fameuses «puces de parquet» sont en fait des puces de chat ou de chien qui émergent de leur cocon après une longue attente (jusqu’à 6 mois !!) et un réveil provoqué par les vibrations du sol à l’arrivée d’un hôte potentiel !!
Il faut également éliminer les formes non adultes dans l’environnement (œufs, larves, nymphes), car elles représentent jusqu’à 95% de la population des puces et la voie de recontamination en l’absence de traitement. Il s’agit de déparasiter dans la maison (couchage) et à l’extérieur (chenil, niche, endroits où se couchent les animaux de préférence) :
Par aspiration
sous les meubles et sur les tapis (le sac d’aspirateur devra être éliminé rapidement) et passage à la machine à laver de tous les couchages.
Par pulvérisation d’insecticides :
dans tous les endroits à risque (attention, ces produits de traitement sont toxiques : toujours bien aérer les pièces après usage, en particulier les chambres d’enfant, et couvrir les aquariums !)
Par fumigation
(attention, ces produits de traitement sont toxiques : toujours bien aérer les pièces après usage, en particulier les chambres d’enfant, et couvrir les aquariums !)
Le tout en un
Certains produits de traitement des chats et chiens ont une action non seulement adulticide, mais également toxique pour les stades d’œuf ou de larve et peuvent permettre de traiter l’environnement à moyen et long terme.
Si la population de puce persiste après le premier traitement des animaux domestiques, il s’agit en général de l’arrivée au stade adulte des œufs et larves présents dans l’environnement direct du chien ou du chat lorsque celui-ci n’a pas été traité en même temps que les animaux. Lorsque cette population est éliminée, la réinfestation se fera par les animaux vivant à l’extérieur du site (maison, bâtiments, jardin) : chats et chiens du voisinage, animaux sauvages comme le hérisson par exemple.
DAPP = Dermatite Allergique par Piqûre de Puce
Maladie du chien et du chat, elle intervient en réaction à la salive de puce, qui est très allergène. Elle est caractérisée par un prurit (c’est à dire une démangeaison) intense et provoque des lésions cutanées : rougeur, épaississement de la peau, croûtes et pellicules. Sont typiques les dépilations à la base de la queue, dans la région dorso-lombaire, l’abdomen, le périnée et la face postérieure des cuisses.
Le diagnostic se fait :
- Par la présence de puce ou d’excréments de puce sur l’animal
- Par les lésions (localisation typique)
- Par le succès du traitement antiparasitaire sur plusieurs mois.
Le traitement consiste à :
- - Traiter les puces sur l’animal et dans son environnement (traiter TOUS les animaux domestiques présents dans la maison !!)
- - Traiter les symptômes : antiinflammatoire, antibiotique en cas de surinfection bactérienne.
Un animal atteint de DAPP restera toute sa vie sensibilisé aux puces : le moindre contact avec piqûre provoquera une rechute. Il faudra donc être vigilant et traiter l’animal atteint ainsi que ses colocataires éventuels régulièrement sans oubli.
Puce, le vecteur
Chien et chat, rarement enfant
Le cas de Dipylidium caninum (Classe des Cestodes = vers plats, famille des Dipepididés) :
Ver plat analogue à un ténia, vivant au stade adulte dans l’intestin de ses hôtes définitifs que sont chats, chiens, ainsi que renard.
Le cycle dure 3 semaines :
Les proglottides = segments porteurs d’œufs, qui se détachent régulièrement du ver adulte, sont excrétés dans le milieu extérieur où ils sont capables de se mouvoir pour atteindre des recoins où sont susceptibles de vivre des larves de puce. Ces dernières absorberont les œufs en s’alimentant de déchets. L’œuf se développe en larve cysticercoïde dans l’abdomen de la larve puis de l’adulte de puce. Il atteindra son hôte définitif lorsque celui-ci avalera la puce adulte en se léchant.
Ce parasite porte peu à conséquence pour son hôte : il est en général asymptomatique.
Symptômes :
- Signe du traîneau :
l’animal se frotte l’arrière-train au sol pour calmer les démangeaisons anales provoquées par le parasite..
- Présence dans l’environnement de segments de ver en grain de riz, mobiles pendant les premières heures.
Traitement :
Demandez spécifiquement à votre vétérinaire un vermifuge traitant les vers plats, car de nombreux produits traitent seulement puces et vers ronds type ascaris !!
ATTENTION : les humains, notamment les enfants, peuvent être contaminés par ingestion de puces de l’animal, ou éventuellement lorsque l’animal lèche le visage de l’enfant. Le parasite est sans danger pour l’homme, un traitement dirigé contre les vers plats suffit à l’éliminer.
Rongeurs et homme
Le cas de la peste
Maladie célèbre pour les épidémies qui ont ravagé les populations humaines au cours des siècles, avec comme exemple le plus frappant la pandémie ayant causé une mortalité évaluée à un quart de la population de l’Europe au XIVème siècle (50 millions de morts estimés, la moitié en Europe, l’autre moitié en Asie et Afrique).
Des résurgences de peste apparaissent encore ponctuellement, avec selon l’OMS 783 cas enregistrés en 2013 dans le monde avec 126 décès. Les trois pays principaux actuellement endémique en Afrique sont Madagascar, La République démocratique du Congo et la Tanzanie. Sur le continent asiatique, ce sont la Chine, la Mongolie et le Vietnam. Sur les continents américains, on notera le Pérou, mais des cas sporadiques de peste autochtone surviennent aux USA.
L’Europe semble épargnée depuis de nombreuses années. En France, les derniers cas humains ont été notifiés en Corse en 1945. Toutefois, les exemples sont nombreux où la maladie est restée latente des années avant de réapparaître brutalement : en Inde p ex, un épisode de peste pulmonaire est survenu en 1994 alors qu’elle semblait éradiquée depuis presque 30 ans. Des cas se sont déclarés en 2003 en Algérie après une absence de 50 ans…
Agent pathogène :
La bactérie Yersinia pestis, découverte en 1894 par Alexandre Yersin, est subdivisée en deux souches : Yersinia pestis orientalis (Inde et Sud-Est asiatique) et le groupe occidental de Yersinia pestis antiqua (Asie centrale et Afrique) et Yersinia pestis medievalis (Russie et Kurdistan). C’est un coccobacille Gram négatif, qui ne sporule pas mais survit au froid dans les cadavres de rongeurs et les excréments de puce. Yersinia est sensible au sec, à la chaleur, aux antiseptiques et certains antibiotiques.
Elle développe habituellement un cycle entre différentes espèces de rongeurs (200 espèces comme rats, gerbilles, marmotte, écureuil, lapin, cobaye par exemple) et de puces : le rat noir lui est très sensible, alors que le rat gris (Rattus norvegicus) est plus résistant. La puce va se contaminer par un repas sanguin sur un rongeur malade, les bactéries se multipliant dans son intestin : elle sera elle-même contaminante 4 jours plus tard et toute son existence, en piquant un nouvel animal ou un humain. Elle ne transmet par contre pas la bactérie à ses œufs.
Elle se transmet à l’homme en général par piqûre de puce, ou parfois par contact direct avec un malade, par inhalation ou plus rarement par ingestion de matières infectieuses.
On dénote 3 types de foyers épidémiologiques (Gentilini) :
- Foyer sauvage : cycle entre rongeurs et puces, atteinte accidentelle de l’homme.
- Foyer rural : cycle entre rongeur sauvage, rat présent près des habitations, et rarement humain par piqûre de puce de rat (Xenopsylla cheopis). Epidémie si présence de la puce de l’homme Pullex irritans.
- Foyer urbain : rare, lié à la présence de la puce de l’homme Pullex irritans.
Symptômes :
On dénote 3 formes de peste en fonction de la voie d’infection empruntée :
- Peste bubonique :
la plus courante. Après une incubation de 3 à 7 jours, il y a apparition de symptômes grippaux : fièvre, faiblesse générale, maux de tête, nausées et vomissement, douleurs dans tout le corps. La bactérie entre dans le corps via le repas sanguin de la puce, et va rejoindre le ganglion lymphatique le plus proche en empruntant la voie lymphatique. Elle s’y développe massivement, provoquant une inflammation locale et la formation du bubon : ce dernier va s’ulcérer et devenir purulent dans 20 à 40% des cas, amenant à la guérison du patient après une période longue de convalescence. Dans le reste des cas, la maladie évolue en septicémie avec mortalité si un traitement n’est pas mis en place. La forme bubonique finit par atteindre les poumons. A ce stade, le malade devient infectieux par production d’aérosol (goutelettes très fines, porteuses de bactéries).
- Peste septicémique :
La bactérie passe directement par la circulation sanguine sans développement de bubon, soit via la piqûre de puce, soit par contact de plaies avec des matières infectieuses.
- Peste pulmonaire : la plus rare.
Elle survient à la suite d’une contamination par aérosol : si un traitement n’est pas immédiatement mis en place, il y a mort en 3 jours.
Diagnostic :
- Identification directe de la bactérie dans des échantillons de bubon, de sang ou d’expectorations.
- Identification par bandelette en test rapide d’antigène (= parties de la bactérie pouvant provoquer une réaction immunitaire de la part de l’hôte) : ce test permet de diagnostiquer rapidement la maladie sur le terrain.
Traitement :
Le traitement est efficace s’il est administré à temps.
élimination de la bactérie par un traitement à base de streptomycine, tétracycline ou chloramphénicol, éventuellement les fluoroquinolones.
- Symptomatique :
en fonction des formes de peste.
Prévention :
- Eviter le contact avec les puces, les rongeurs et les malades de la peste.
- Traiter contre les puces les animaux de compagnie, les habitations en cas de besoin.
- Mettre sous traitement prophylactique les personnes saines dans l’entourage des malades (tétracyclines, sulfamides).
- Surveiller les apparitions d’épidémie sur rongeur sensible pour éviter la propagation de la maladie. Traiter immédiatement les premiers malades humains le cas échéant.
LA PESTE HUMAINE EXISTE ENCORE DE NOS JOURS, MAIS PEUT ÊTRE CONTRÔLÉE PAR LES ANTIBIOTIQUES SI LE TRAITEMENT EST DÉMARRÉ SUFFISAMMENT TÔT !!