Un étrange cas clinique…

3 agnelles de 18 mois, Noire du Velay  croisées Charolais. En août 2017, apparition soudaine d’un comportement anormal : les 3 ovins commencent à se gratter la face et se mordre les membres au sang. Pas d’autre anomalie comportementale, ni d’autre symptôme.

Serait-ce un début de gale ?

Curieusement, les chats du propriétaire se mettent à se gratter aussi…

Des puces ??

Les enfants présentent également quelques lésions cutanées avec prurit : et plus ils restent à l’extérieur, dans le jardin, plus cela empire…

Un étrange  cas clinique…

Le diagnostic : démangeaison sévère avec lésion cutanée rougeâtre apparaissant en fin d’été ?

Et oui, les ovins aussi peuvent être atteints par les aoûtats !!!

Neotrumbicula autumnalis

Il s’agit d’un acarien dont seul le stade larvaire est parasite obligatoire. On le trouve en Europe, y compris en Angleterre et en Irlande, ainsi que dans certaines zones de la Russie occidentale et de la Turquie.

Ce sont des arthropodes vivant dans et à la surface du sol, sans préférence particulière quant à leur biotope, puisqu’on les retrouve tant en forêt qu’en ville, ou en campagne, respectivement dans les prés ou les champs de céréales !!

Le cycle de la bébête

Au printemps, les œufs sont déposés par la femelle adulte à la surface du sol. La larve va émerger en 10 jours à un mois selon les conditions d’humidité et de température. Elle va chercher à atteindre un hôte afin de se nourrir et continuer son développement : pour se faire, elle s’installe sur la végétation proche, formant à plusieurs larves des agrégats orangés qui s’accrocheront ensemble sur un hôte à plume ou à poil.

La larve ne se nourrit pas de sang, mais de tissus cutanés que sa salive dégrade et lyse avant aspiration.

Elle s’installe :

- Chez les mammifères dans les zones de peau fine : membres notamment espaces interdigités, pourtour des yeux, pavillon de l’oreille.

- Chez les oiseaux : de préférence au niveau des follicules des plumes.

- Chez l’homme : tout particulièrement les zones où une pression des vêtements s’exerce (élastique de chaussette, soutien-gorge, etc.).

Hôtes connus :

- Homme

- Chien, chat

- Cheval

- Lapin

- Rongeurs

- Hérisson

- Chauve-souris

- Mustélidés

- Oiseaux…

La larve va se nourrir sur son hôte pendant 2 à 10 jours. Après quoi, elle rejoint le sol et se développe en plusieurs stades nymphaux :

- Protonymphe : ne se nourrit pas, reste immobile.

- Deutonymphe : active, se nourrit de fluides végétaux, d’autres arthropodes ainsi que des œufs de ces derniers.

- Tritonymphe : stade de développement inactif, ne se nourrissant pas non plus.

- Adulte : mobile, avec la même alimentation que la deutonymphe.

La larve mesure entre 0,2 et 0,4 mm, compte 6 pattes et présente une couleur orangée typique.

Les autres stades ont 8 pattes, sont incolores, l’adulte pouvant mesurer jusqu’à 2 mm.

La durée du cycle de développement dépend des conditions extérieures : in vitro, il se complète en 4 à 5 mois.

L’adulte peut entrer en léthargie et survivre à l’hiver.

Pathologie

La salive de la larve est irritante et provoque l’inflammation locale responsable des signes cliniques.

Il n’y a pas de transmission entre hôtes potentiels, mais la contamination simultanée par les espèces partageant la même aire à risque.

Neotrumbicula autumnalis peut agir comme vecteur de certains pathogènes comme les Borrelia par exemple, via une transmission trans- ovarienne (passage du pathogène de la larve se nourrissant sur un hôte infecté, à la larve de la génération suivante se nourrissant sur un hôte indemne, via le portage par les œufs).

Signes cliniques

- Prurit intense : forte démangeaison des zones atteintes par les larves, déclenchant grattements et morsures de la part de l’hôte.

- Dépilation.

- Lésions cutanées dues à l’inflammation et aux frottements.

- Infection secondaire possible.

- En cas d’infestation massive : asthénie, atteinte neurologique, parésie des membres postérieurs, boiterie notamment.

Diagnostic différentiel

En fonction de l’hôte :

- Gales (sarcoptique, psoroptique, notoédrique)

- Phtiriose (poux)

- Pulicose (puce)

- Cheyletiellose, démodécie (acariens parasites des chats et chiens)

- Dermatophytose (mycose cutanée)

- Dermatite d’origine bactérienne

- Photosensibilisation : en général présence également d’œdème de la face !

- etc...

Prévention

- Limiter l’accès des zones infestées dès l’apparition des symptômes.

- Utilisation de répulsif sur les vêtements et les animaux.

L’élimination des acariens adultes dans l’environnement par pulvérisation d’acaricide est contreproductive :

D’une part, il est illusoire d’espérer se débarrasser de la totalité de la population des aoûtats. Les autres espèces d’arthopodes dont les prédateurs naturels des aoûtats, seront aussi supprimées, provoquant un déséquilibre de la microfaune.

D’autre part, rien ne dit que le problème réapparaîtra l’année suivante : en effet, aucune attaque d’aoûtat n’avait eu lieu chez ce propriétaire les années précédentes. En 2018, il y a eu une attaque d’aoûtats sur les humains essentiellement et seulement sur une semaine.  


Traitement :

- Avec un antiparasitaire externe comme la perméthrine par exemple.

- Par un anti-inflammatoire en cas d’inflammation cutanée sévère (la salive est allergisante).

- En traitement antibiotique en cas d’infection secondaire.


La trombiculose ou «Aoûtat – Vendangeur – Rouget – Araignée rouge» est saisonnière : été / automne !!