- Par AP
Comment bien gérer et entretenir une haie bocagère ?
Une haie bocagère est une haie constituée d’arbres et d’arbustes qui poussent en différentes strates : grands arbres, grands arbustes, buissons, lianes… Les végétaux qui composent cette haie doivent être des essences indigènes qui seront adaptées au terroir local, donc adaptées au climat et au sol de votre région.
Dans un précédent numéro nous avons vu l’intérêt des haies bocagères (Bulletin N°935- Sept 2022), voyons aujourd’hui quelques pistes pour les entretenir.
Autrefois, ces haies bocagères servaient, entre autres, à délimiter les parcelles agricoles, les prairies ou de clôture naturelle pour le bétail. Le grand remembrement initié entre les années 60 et 80 a fait en sorte de détruire ces haies pour créer des parcelles de plus en plus grandes La suppression de ces haies a été, dévastatrice pour la faune et la biodiversité en général, mais a eu aussi des impacts négatifs sur la fertilité des sols et le maintien des terres.
Heureusement, on s’est rendu compte de l’importance des haies bocagères, et des projets de replantation voient le jour un peu partout en France.
Les haies bocagères servaient initialement à délimiter les terrains et les parcelles agricoles, mais ce n’est là qu’une partie de leur utilité :
- les racines des arbres et des arbustes permettent le maintien des terres face à l’érosion. Plantés perpendiculairement à la pente, les arbres favorisent la pénétration de l’eau dans le sol. Le drainage et le filtrage de l’eau est aussi amélioré, ce qui implique que certains polluants peuvent se fixer au sein des racines des arbres et évitent ainsi de se retrouver dans les nappes phréatiques ;
- les haies filtrent le vent, limitant ainsi l’effet de l’érosion éolienne ;
- les feuilles et certaines branches des arbres et ces arbustes tombent au sol et créent de l’humus, enrichissant peu à peu le sol aux alentours ;
- ces trois facteurs cités précédemment concourent ensemble pour préserver la fertilité du sol ;
- les haies bocagères étaient une source de bois gratuit et local pour les gens alentours : bois de chauffage, piquets de clôture, petits bois pour l’artisanat ou des petites constructions ;
- selon les arbustes en présence, ces haies pouvaient aussi fournir une source de nourriture : baies de sureau, petits fruits, pommes… ;
- les haies bocagères présentent un intérêt esthétique et paysager : le tourisme local peut s’en trouver revalorisé ;
- les haies accueillent toute une faune en leur offrant le gîte et le couvert : oiseaux, petits mammifères, insectes, arthropodes terrestres, chauve-souris… Ces haies, lorsqu’elles sont reliées entre elles, peuvent constituer des corridors écologiques faisant ainsi la liaison entre deux milieux naturels. Une biodiversité retrouvée permet de recréer un équilibre de la chaîne alimentaire (proies, prédateurs, parasites, symbiose…). Toute cette faune va œuvrer à limiter les maladies et les ravageurs des cultures environnantes.
Nouvelle plantation
Il est préférable d’implanter des haies assez larges (double ou triple rangs) pour constituer un refuge efficace à la faune terrestre. Le maintien d’une bande herbeuse en pied de haie est également judicieux pour compléter l’attrait pour les auxiliaires, mais aussi pour faciliter l’accès à la haie par l’agriculteur.
Pour une nouvelle plantation de haie ou de buisson, il est pertinent de s’inspirer de la composition des haies anciennes déjà présentes dans le secteur pour sélectionner les essences adaptées à votre exploitation.
Certaines essences sont à éviter en grandes cultures :
- Les conifères, car ils sont moins intéressants pour les auxiliaires des cultures et certains sont même des plantes hôtes à une famille de noctuelles nuisibles : Agrotis.
- Les Prunus (cerisier, merisier à grappes) car ils hébergent le puceron du merisier à grappes (Rhopalosiphum padi). Ce puceron est susceptible de s’attaquer aux céréales à paille et au maïs.
- Le prunier car il est l’hôte primaire du puceron vert du pêcher (Myzus persicae) et peut attaquer le colza.
Pour choisir des essences favorables aux auxiliaires les plus adaptés à son exploitation, il est possible de s’aider de l’application Auxil’Haie.
La plantation se fera préférentiellement en automne (novembre-décembre), pour que les arbres et arbustes aient le temps de se constituer un bon système racinaire avant l’année suivante. La plantation se fait généralement (mais ce n’est pas obligatoire) sur deux rangs et en quinconce. Ainsi, la haie sera très touffue dans un minimum de temps.
- Pour une haie constituée d’arbustes : on conviendra d’une distance de 80 cm entre les rangs et de 1 m entre les arbustes.
- Pour une haie incluant des arbres (haut jet et cépées) : comptez une distance entre les rangs d’un peu plus d’1 m, mais au moins 3 m entre les arbres. Par la suite, vous pourrez intercaler des arbustes dans les « trous ».
L’arrosage sera à suivre uniquement la première année en été. Ensuite, lorsque les racines se seront bien développées et que la haie sera plus touffue, les arbres et arbustes se débrouilleront sans aide extérieure.
Période conseillée pour l’entretien
La meilleure période est de novembre à février (pendant le repos végétatif). Il est fortement déconseillé d’entretenir les haies du 1er avril jusqu’au 31 juillet, sauf pour des raisons sanitaires ou de sécurité.
Afin de pérenniser les haies, il est fortement déconseillé de réaliser des coupes à blanc (abattage de l’ensemble des arbres d’une même haie au même moment).
Le désherbage chimique est à proscrire. Son efficacité n’est pas avérée et il est interdit près des fossés (protection de l’eau).
Soyez vigilant sur les dispositifs de sécurité (casque, pantalon anti-coupure, ne pas être seul...).
Sur les jeunes haies de moins de 3 ans :
Maîtriser la concurrence des plantes herbacées durant la période estivale par une fauche.
La taille de formation :
- Suppression des branches les plus basses
- Suppression des fourches ou multiples têtes afin d’équilibrer l’arbre (de novembre à mi-mars).
Sur les haies adultes
L’objectif principal est de maîtriser l’emprise de la haie en adoptant des pratiques qui limiteront les interventions et pérenniseront la haie.
Que faire des haies mitoyennes ?
En cas de haie mitoyenne, chaque agriculteur a la maîtrise de la moitié de la haie. Il est recommandé de réaliser l’entretien de la haie en accord avec l’ensemble des exploitants et propriétaires afin que la haie ne soit pas déséquilibrée. En effet, un arbre taillé d’un seul côté sera fragilisé, avec un risque de chute en cas de vents violents.
Réaliser une bonne coupe d’élagage
Un élagage efficace consiste à supprimer les branches basses des arbres afin de maîtriser l’emprise des haies en incitant les arbres à pousser le plus droit possible. Ce principe de coupe permet de limiter les maladies (sans former de “chicots”) et d’assurer une meilleure cicatrisation. De plus, il est important de ne pas élaguer plus d’1/3 de la hauteur de l’arbre pour ne pas provoquer de stress, ce qui favoriserait les rejets.
Former une cépée
Former une cépée permet de renforcer l’effet brise vent de la haie par un meilleur bourrage et permet également une valorisation en bois de chauffage. Cette méthode est à renouveler généralement tous les 10 ans. Les coupes doivent être nettes, sans éclatement de la souche et sans décollement de l’écorce pou éviter l’infiltration de l’eau entre l’écorce et le bois. La surface de coupe doit être lisse et légèrement en pente (pour permettre l”écoulement des eaux.
Attention : toutes les essences ne supportent pas ce type de taille. Cette coupe sera définitive pour les conifères et le hêtre. Les essences bocagères bien adaptées sont le noisetier, le saule, le charme, le châtaignier ou encore le frêne.
Dans les 2 années qui suivent la plantation, remplacer les plants morts si le taux de reprise est inférieur à 90 %.
Dispositions légales
- Usages locaux - Règlements (arrêté du Maire ou du Préfet, document d’urbanisme ou règlement des associations foncières) - Règles édictées par les lois, décrets et arrêtés.
A défaut d’usages et de règlements : code rural, code civil art. 671…
Ces dispositions légales ne s’opposent pas à ce que des intéressés adoptent entre eux, d’un commun accord (par écrit), d’autres distances, pourvu que l’ordre public soit respecté.
Entre propriétés privées
(ARTICLE 671 A 673 du code civil Votre propriété : la distance par rapport au fonds voisin dépend de la hauteur future de la haie :
- 50 centimètres si la hauteur de la haie < à 2 mètres à l’âge adulte,
- à 2 mètres si la hauteur de la haie est > 2 mètres à l’âge adulte.
Avec un mur mitoyen, chacun peut appuyer sa plantation jusqu’à la crête du mur. S’il n’est pas mitoyen, seul le propriétaire du mur peut appuyer ses espaliers.
3. La plantation est MITOYENNE, lorsqu’elle est posée en limite des 2 propriétés (suppose un document écrit). Il existe des conventions de plantation à distance moindre que la distance légale et pour les plantations en mitoyenneté.
Propriétés situées en bordure d’un chemin
Chemin privé, commun à plusieurs, on peut planter en bordure pourvu que le chemin reste libre, sans aucune gêne.
Chemin rural, en bordure sauf :
- Arrêté du Maire qui peut faire observer les distances du Code Civil (article 671) lorsque la sécurité de la circulation, ou la conservation du chemin peut le nécessiter.
- Règlement adopté par l’Association Foncière (A.F.).
Propriétés privées situées en bordure des voies publiques départementales et communales
- Application des distances du C.C.
2 m ou 0,50 m à partir de la limite de la voie publique (décret 1964 et 1987 et arrêté préfectoral de 1965 ; arrêté municipal s’il existe).
- Avec un mur de clôture. Plantation en espaliers possible à l’intérieur de la propriété privée.
L’Etat a le droit de planter sur les routes nationales à une distance quelconque des propriétés riveraines. En effet, le code civil ne règle pas les rapports entre l’Etat et les particuliers. Toutefois, une circulaire 1984 définit les marges de recul que l’administration doit respecter.
Lignes électriques (EDF-GDF)
Lorsque le chemin, la voie, la route est empruntée par une ligne, le recul de la plantation est fonction de la capacité de ligne. Le minimum est :
- de 3 mètres pour les plantations pouvant atteindre 7 mètres de hauteur,
- distance : jusqu’à 10 mètres pour les plantations de 14 mètres et plus,
- réseau souterrain (électrique et gaz) : distance de 3 mètres de part et d’autre de la canalisation.
Le long des cours d’eau
Cours d’eau domaniaux navigables : plantation à 9,75 m du côté du halage, 3,25 m sur l’autre rive.
Cours d’eau domaniaux non navigables : une servitude (dite de marche pied) de 3,25 m est due.
Cours non domaniaux et émissaires d’assainissement : il existe une servitude de libre passage d’une largeur habituelle de 4 m.
Réseau Ferré de France
Les arbres de haut-jet : plantation à 6 mètres minimum de la voie ferrée (LOI DU 15/07/45).
Les autres plantations : distance de 2 mètres.