Pourquoi les végans ont tort

Le véganisme est un mode de vie qui fait de plus en plus parler. Face à cette problématique, l’Alliance a invité 2 conférenciers pour répondre aux arguments des adeptes de ce mouvement et estimer s’il s’agit d’un effet de mode ou une tendance lourde.

Cette thématique a été abordée en deux temps. Mme Josée Cloutier a donné son point de vue de nutritionniste et Christophe Lapasin de Célène (Cellule Energie-Environnement de Culture Viande) nous a démontré que l’élevage n’est pas mauvais pour l’environnement.



Pourquoi les végans ont tort

Qu’est-ce qu’un végan ?

Le vegan ne veut contribuer en rien à l’exploitation des animaux. Il ne mange ni poisson, ni viande, ni produit laitier et aucun de leurs dérivés. A travers ses revendications le végan ne souhaite pas améliorer l’élevage mais le détruire (il ne faut pas tuer ni exploiter l’animal). Il met l’homme au même niveau que toutes les espèces. Le végan est un activiste qui veut faire passer son idéologie. Il fait feu de tout bois : sur la nutrition, la santé et sur l’environnement. 

Les données du nombre de végans sont imprécises mais la communauté végan est très minoritaire en France. On compte environ 0.5 % de la population qui se dit végan (soit 340000 personnes en France). Parallèlement on estime à 2 % de végétariens et 1/3 de la population se dit fléxitariens (mode alimentaire visant à consommer moins de viande et de poisson, sans pour autant y renoncer totalement).

Le végan prône donc une alimentation saine et naturelle, respectant le bien être animal. Il est jeune, éduqué et revendique son appartenance à une communauté. Le point fort de cette communauté sont les réseaux sociaux car ils y sont très visibles et créent souvent le buzz sur des pseudo affirmations. Les arguments sont utilisés de manière un peu brute.

Est-ce que cette évolution vers le véganisme est nutritionnellement recevable ?

Pour respecter leurs croyances et remplacer la viande, les végans ont plusieurs pistes :

- Les végans espèrent pouvoir produire de la viande in-vitro. Une expérimentation en cours consiste à prélever des cellules souches dans le muscle de l’épaule d’une vache et de les mettre en « culture » en laboratoire. C’est aujourd’hui quelque chose de vraiment préconisé par les végans qui y voient une alternative intéressante pour éviter la cruauté envers les animaux. Cependant on peut se poser la question sur la déontologie et sur le coût carbone que cela va représenter.

- Passer au 100 % végétal. Mais certains légumes secs sont difficiles à digérer pour certains et parfois contiennent des facteurs antinutritionnels qui empêchent l’absorption du fer

- Remplacer la viande par des produits « simili carnés » (produits végétariens qui essaient de se rapprocher de l’image de la viande soit par la texture, la forme, la couleur voire le goût).

Analyse des simili-carnés

Mme Cloutier a mené une étude pour Interbev qui consiste à répertorier tous les produits végétariens qui imitent la viande sur 9 enseignes en Ile de France puis a procédé à l’analyse de ces produits simili-carnés.

Sur 157 répertoriés, 138 ont été retenus et définis en 15 catégories. L’ensemble des informations indiquées sur les emballages et étiquetage a été décortiqué (valeurs nutritionnelles, teneurs en différents nutriments, calories, graisse, sel, sucre...). Des photos de ces produits ont été prises et comparées à l’équivalent carné.

Les comparatifs des teneurs en nutriments ont été faits par rapport à la table officielle Ciqual et le guide de découpe d’interbev. Retenons que le point fort de la viande c’est sa qualité nutritionnelle. Sur l’emballage des simili-carnés il n’y a peu d’information sur les ingrédients (Kcal, graisses, glucides, sucres, fibres, sel, protéines. La teneur en vitamines n’était pas souvent indiquée). 

Au regard des emballages, on constate une vraie volonté d’imiter (et non pas d’innover). On y trouve des indications liées à la préparation de la viande (à poêler, barbecue…) alors que nous avons affaire à des produits déjà cuits !! Il y a aussi de nombreuses allégations nutritionnelles et logos prometteurs mais parfois grandement mensongers. Par exemple, le Grill végétal de Céréal indique “-82 % d’acides gras saturés”, alors que le produit était très gras, plus gras que la moyenne des steak hachés.

Les termes 100 % végétal sont trompeurs car certaines recettes très élaborées de produits végétariens ont des teneurs en graisses ajoutées, sous forme saturées, parfois même en quantité supérieure aux produits carnés. 

Les emballages de ces produits font la promesse d’aliments forcément bons, peu gras, peu caloriques alors que lorsqu’on décortique les étiquettes on a une autre vérité. Dans les 15 catégories, il y a entre 8 et 21 ingrédients pour fabriquer ces simili-viande. Des ingrédients qui sont souvent des additifs, colorants, conservateurs, sels ajoutés…. En voulant imiter, les fabricants font un produit très transformé. De plus, tous ces produits contiennent au moins 1 des 14 allergènes majeurs (présence ou trace), certains produits en ont jusqu’à 8 ou 9 (par ex les simili steaks ou les galettes aux pois chiches). 

En voulant imiter de la viande on introduit donc dans ces produits des ingrédients qui ne sont pas présents naturellement dans la viande A terme, on peut se demander si la consommation de ce type d’aliment ne va pas amener à des problèmes sur la santé des individus plutôt que d’apporter des solutions.

Trop gras

Dans ces produits il y a beaucoup de graisses végétales ajoutées dont un certain nombre associe des huiles dites nobles à des huiles plus critiquées, comme l’huile de palme ou l’huile de coco (qui contient des acides gras saturés) par exemple. 

Tous les similis steak hachés, se sont révélés êtres tous plus gras qu’un steak haché normal et bien plus caloriques. 

Les sources de protéines sont variées mais non qualitatives

La composition de la viande est parfaite pour l’apport d’acides aminés indispensables à la santé pour construire nos cellules et entretenir nos muscles et organes. Les teneurs en acides aminés sont malheureusement en quantité insuffisante dans les végétaux. Seulement 2 sources végétales contiennent l’ensemble des acides aminés indispensables à la santé : le soja et le quinoa (qui lui est très pauvre en protéine (4%)).  Seul le soja peut prétendre remplacer la viande. La nutritionniste conseille donc de l’associer à une céréale (l’association optimale en protéine étant soja et blé). 

Les experts jugent que pour pouvoir arriver à avoir un apport équivalent en protéines avec ce type d’aliment simili il faudrait augmenter ses apports quotidiens de 15 à 25 %.  

Quid de l’augmentation de production de soja ! N’y aura-t-il pas un problème environnemental qui sera créé ?

Véganisme et santé

Les régimes exclusifs (type végan) pour d’autres raisons que la santé ne sont pas recommandés par les nutritionnistes à cause des risques de carence. C’est strictement contre-indiqué chez les enfants, les personnes âgées et les femmes enceintes.

Le végétarisme est plutôt positif quant à la prévention des maladies cardio-vasculaires et certains cancers.

De manière générale, les végans ont des apports plus faibles en calcium et en zinc. Il y a aussi un déficit probable en protéine, un excès d’apport en glucides (qui se transforment en graisses si pris en excès) et un déséquilibre en lipides. 

1 végétarien sur 3 et 100 % des végétaliens seraient carencés en vit B12 (présente uniquement dans des sources animales). Les végans doivent donc se supplémenter en vitamines B12.  

Le programme National de Nutrition et Santé (PNNS) établi par le ministère chargé de la Santé conseille de limiter sa consommation de viande (hors volaille) à 500 grammes par semaine pour un adulte, ce qui correspond à environ 3 à 4 steaks. Aujourd’hui la consommation moyenne de viande (hors volaille) par adulte en France est de 320 grammes par semaine (donc conforme aux recommandations).

Le produit carné reste finalement le produit le plus naturel qui soit et permet le maintien des repères alimentaires et dans l’assiette. Il est tout à fait possible aujourd’hui de manger en harmonie tout en recherchant une alimentation saine, équilibrée et naturelle, dans le respect du bien-être animal.  



3 idées reçues environnementales avancées par les végans : 

- Idée reçue N°1 - 

La production de viande demande beaucoup d’eau. 

On entend depuis longtemps que 15000 litres d’eau sont nécessaires par kilo de carcasse. Pour Christophe Lapasin c’est une erreur méthodologique que de le diffuser comme ça. La valeur de 15 000 litres d’eau a été obtenue pour le calcul de la « water footprint » (qui calcule l’empreinte virtuelle de l’eau) qui englobe l’eau brute (eau bleue), collectée par les rivières et les réseaux, consommée par les animaux et l’irrigation des cultures) ; l’eau verte (eau de pluie qui tombe sur la prairie) et l’eau grise (dépollution et recyclage des déchets organiques des animaux). Or, la méthode « water footprint »   ne tient pas compte des cycles biologiques, de l’eau qui retourne à la terre, dans les plantes…  94 % de ce volume correspond à de l’eau de pluie (eau verte), prise dans les sols et consommée par les plantes. Cette quantité retourne dans le cycle de l’eau, et elle serait consommée même s’il n’y avait pas d’élevage. 

Si on fait un calcul selon la norme ISO 14064 (norme pour calculer la consommation d’eau) on arrive à 60 litres d’eau pour produire 1 kg de viande de bœuf ce qui est plus exact.


- Idée reçue N°2 - 

L’élevage est le 1er contributeur de gaz à effet de serre (avant même le transport et la production d’énergie)

Cette idée reçue est fausse.  L’élevage correspond à 5 % des émissions de gaz à effet de serre contre 14 % pour le transport. A l’origine, la FAO avait fait entrer dans le calcul des gaz à effet de serre émis par l’élevage l’ensemble des effets directs et indirects (fabrication de l’aliment, transport de l’animal, transport de l’aliment…). Pour le transport, le calcul n’avais pas été fait en tenant compte des effets indirects (extraction du pétrole, transport du pétrole, recyclage des voitures…). En ne faisant entrer dans le calcul que les effets directs, le transport émet plus de gaz à effet de serre que l’élevage. 

Il est possible toutefois de réduire de 15 % ces émissions de gaz en élevage de ruminants en modifiant ses pratiques d’élevage. En gestion de troupeau on peut par exemple baisser l’âge du 1er vêlage ou en travaillant sur l’efficience de l’alimentation (avec des aliments plus faibles en carbone).


- Idée reçue N°3 - 

La nourriture produite pour les animaux devrait servir à nourrir l’homme

80 % de l’alimentation animale (niveau mondial) n’est pas consommable par l’homme. De toutes les protéines végétales produites pour l’alimentation des animaux (des ruminants notamment) beaucoup sont des fourrages ou de l’herbe non comestibles par l’homme. Cette herbe est de plus produite sur des terres souvent peu propices aux cultures.  


Actions de la filière sur l’environnement à mettre en avant

Limiter la déforestation qui continue à augmenter en forêt amazonienne. Mais en France, l’usage du soja est mineur (0.8 % bovin viande et moins de 5 % sur les bovins laitiers). Les exploitations produisent en majorité le fourrage nécessaire au fonctionnement de leur exploitation. 


Limiter la pollution de l’eau et de l’air par les déjections

Les émissions d’ammoniac, qui contribuent à la formation de particules fines et à l’eutrophisation des milieux, sont à 97 % dues à l’agriculture. La réduction des émissions de NH3 passe principalement par une meilleure gestion et valorisation de l’azote contenu dans les effluents d’élevage, les fertilisants et l’alimentation animale. Une étude INTERBEV est en cours pour viser à réduire ces émissions.

Au niveau local la méthanisation se développe et permet de produire de l’énergie. 


Responsabiliser les entreprises en matière d’emballage.

Les produits viande sont remis au consommateur emballés. Il faut s’assurer que l’emballage soit bien recyclable et il est indispensable de créer de nouvelles filières pour doubler le taux de recyclage des plastiques. 


Valoriser les co-produits 

Moins de la moitié de l’animal fini dans l’alimentation humaine. Le reste n’est pas du déchet pour autant (os : gélatine ; peau : maroquinerie ; abats : consommés par l’homme ou les animaux…), mais la valeur économique des co-produits n’est pas toujours bien valorisée.  Par exemple, avec la laine ou le cuir, un travail est à faire pour améliorer la qualité du produit fini…

Apprendre à cuisiner les abats, souvent rejetés par les citadins est un moyen de valoriser ces co-produits. A terme, cela augmenterait la part de l’animal consommée par l’homme.


D’après une enquête du Credoc les français placent l’environnement en tête de leur préoccupation et 26 % des Français se préoccupent de leur alimentation.