Comprendre la Border disease

La Border disease est une maladie virale dont l’impact est probablement sous-estimé en France. Dans les départements où elle sévit les pertes sont loin d’être négligeables avec essentiellement des avortements.


Comprendre la Border disease

La maladie

Elle est due à un pestivirus à très forte variabilité génétique spécifique des ovins et très proche du pestivirus responsable de la BVD (Maladie des muqueuses) chez les bovins.

Elle a été identifiée pour la première fois en 1959 au Royaume Uni puis elle s’est répandue à travers le monde.

En France elle est apparue en 1983-1984 dans le bassin de Roquefort où elle avait entraîné à l’époque des troubles sévères chez les agneaux mais aussi chez les adultes, avec par exemple jusqu’à 90 % de mortalité des agneaux dans les troupeaux infectés.


Contrairement à la BVD chez les bovins pour laquelle un plan d’éradication a été mis en place depuis peu suite à des dépistages sérologiques pendant de nombreuses années, on ne dispose que de peu de données sérologiques en France concernant la Border Disease. On sait qu’elle est présente en Aveyron, dans l’Ariège, dans les Pyrénées Atlantiques ; en revanche un sondage sérologique effectué en 2017-2018 en Haute-Vienne n’a pas permis d’identifier l’infection dans les troupeaux ; mais il ne s’agissait que d’un sondage …

Quels sont les symptômes ?

Les symptômes principaux de la Border Disease sont des troubles de la reproduction. 

Les conséquences de l’infection par le virus d’une brebis gestante varient selon le stade de gestation :

- de 0 à 60 jours de gestation : avortements, naissance d’agneaux malformés, naissance d’agneaux normaux, naissance d’agneaux IPI (infectés permanents immunotolérants).

- de 60 à 80 jours de gestation : rares avortements, naissance d’agneaux malformés, naissance d’agneaux normaux, naissance d’agneaux IPI.

- de 80 jours au terme de gestation : mort fœtale et mortinatalité faibles, naissance d’agneaux normaux ou faibles.

Les agneaux IPI jouent un rôle essentiel dans la propagation et la pérennisation de la maladie au sein d’un troupeau. En effet ils sont porteurs du virus qu’ils excrètent en permanence et de manière intense, mais ils n’ont aucun anticorps. Ils sont le réservoir principal de la maladie. Ce sont en général des agneaux faibles, présentant des retards de croissance, une toison anormale (hirsute), des troubles nerveux (tremblements), une immunodépression due au virus responsable de diverses affections néonatales (diarrhées, pneumonies…) et une mortalité importante. Ces animaux meurent jeunes en général, mais malheureusement ils peuvent aussi présenter un aspect extérieur normal…

Les agneaux qui naissent non IPI peuvent être infectés par le virus, ils présentent alors une virémie transitoire puis éliminent le virus en quelques jours à quelques semaines et ne transmettent alors plus la maladie. Les symptômes rencontrés sont liés au pouvoir immunodépresseur du pestivirus : diarrhées, pneumonies, ecthyma... qui sont souvent difficiles à soigner. Les signes cliniques rencontrés chez les adultes infectés de manière transitoire sont souvent peu sévères.

La maladie peut circuler dans un troupeau sans que l’éleveur ne s’en rende compte car les symptômes caractéristiques de la Border Disease ne sont pas toujours présents simultanément.

Le virus est peu résistant dans le milieu extérieur et ce sont essentiellement les animaux IPI qui jouent un rôle majeur de propagation. Le risque est bien sûr accru pour les troupeaux pratiquant la transhumance. Le virus peut aussi être transmis par des animaux infectés transitoires pendant leur phase de virémie, ou par certains actes : injections avec aiguilles contaminées, castrations, biberons…

NB : des ovins en contact étroit avec des bovins excrétant le virus BVD pourraient être contaminés et éventuellement donner naissance à des agneaux IPI.

Contrôle de la maladie  

Il n’existe pas de traitement et donc la prophylaxie est le seul moyen de lutte. Contrairement à la BVD chez les bovins il n’existe pas de politique de lutte nationale, notamment une campagne de sérologies sur les troupeaux français qui permettrait d’en définir le statut sanitaire vis à vis de la Border Disease. Des plans de lutte ont été mis en place dans les départements infectés, ils sont en constante évolution au fur et à mesure de l’avancée des connaissances acquises sur la maladie.


Prophylaxie sanitaire 

- Dans un troupeau indemne sans signes cliniques avérés il est important de mettre en place des mesures de  biosécurité : contrôle des introductions d’animaux (issus de cheptels reconnus indemnes ou testés individuellement), prudence lors de regroupement d’animaux (l’idéal serait de définir un statut sanitaire individuel ou de troupeau vis à vis de la Border Disease ), respect des bonnes pratiques d’hygiène (nettoyage et désinfection du matériel), séparer bovins et ovins pour éviter les contaminations inter-espèces.

- Dans un troupeau contaminé donc dans lequel le virus a été mis en évidence, il faut éviter en priorité de contaminer les cheptels voisins.  La mesure prioritaire est la détection et l’élimination des animaux IPI qui sont de véritables bombes à virus sources de contamination et de pérennisation de la maladie. Ils sont positifs à la recherche du virus par PCR et négatifs à la recherche d’Anticorps (à la différence des animaux non IPI qui fabriquent des Ac quand ils sont en contact avec le virus). Les analyses PCR sont coûteuses et sont donc d’abord réalisées sur mélanges de sérums (5 à 10) puis individuellement en cas de positivité. La recherche des IPI se fait en priorité sur les agneaux et agnelles de renouvellement et sur les antenaises. Les animaux IPI seront isolés et définitivement écartés de la reproduction et de la commercialisation.


Prophylaxie médicale 

Il n’existe actuellement aucun vaccin contre la Border Disease ; il est possible d’utiliser hors AMM (principe de la cascade) des vaccins bovins contre la BVD et seuls les vaccins vivants atténués auraient une certaine efficacité, mais celle-ci est inconstante sur le terrain et l’immunité obtenue est souvent imparfaite et de courte durée,

Le but de la vaccination est avant tout d’assurer une protection du fœtus contre le virus afin d’éviter la naissance d’agneaux IPI, et pour se faire, le vaccin sera administré dans un délai court avant la mise en lutte afin d’avoir un taux maximal d’Ac pendant les 70 premiers jours de gestation.

Le coût de la vaccination est non négligeable et elle ne pourra être envisagée que comme un complément aux mesures de biosécurité et de dépistage-élimination des IPI. En cas de non maîtrise de l’infection dans un élevage ou de risque de contamination par un élevage voisin atteint, ou d’une mise en estive elle pourrait permettre d’augmenter l’immunité du troupeau et donc limiter l’impact clinique de la maladie.


Les connaissances scientifiques sur la Border Disease évoluant sans cesse il est nécessaire d’adapter régulièrement les plans de lutte mis en place au niveau local en attendant une éventuelle politique de lutte nationale et un vaccin spécifique.